Voici venu le jour que j’attendais le plus dans ce voyage. C’est d’ailleurs la raison d’être de ce voyage à Porto: non pas Porto, mais le Douro, et surtout sa ligne de chemin de fer, la ligne du Douro. Considérée comme l’une des plus belles d’Europe, elle ne va pas faire mentir sa réputation! Heureux hasard, un épisode de Des Trains pas comme les Autres était paru quelques semaines plus tôt, de quoi aiguiser l’appétit. Ce train est le plus beau et le meilleur que j’ai pu prendre, une trace indélébile reste dès lors que vous le prenez et qu’il n’est pas considéré comme un simple moyen de transport.
Je voulais absolument passer une journée dans le train. Or la ligne ne fait que 4 à 5 heures de long. La solution que j’ai trouvée est de m’arrêter dans plusieurs villages et de faire la ligne en deux jours. C’est ainsi qu’au départ de Porto Sao Bento, je m’arrête à Pinhao au bout de trois heures, puis je reprends le train en fin d’après-midi pour Tua, où une nuit loin de tout m’attend. Le lendemain, ce sera le trajet Tua-Pocinho, puis Pocinho-Porto.
Le premier train de la journée part à 9h de Porto Sao Bento. Afin d’éviter la foule du week-end, j’avais calé l’itinéraire pour qu’il se fasse un lundi et un mardi. A Porto Sao Bento, il faut ABSOLUMENT monter à droite dans le sens de la marche; ceux qui se mettront à gauche ne verront rien du Douro puisqu’il sera toujours à droite!
Comble de chance, j’ai ce jour-là le droit aux wagons du musée du train: c’est la promesse d’heures de secousses ferroviaires. Au-delà des secousses, voyager dans ces wagons vous plonge dans un autre univers et vous fait tout oublier sauf le paysage et l’expérience.
Au départ de Sao Bento, comme la veille, le Douro de Porto est visible quelques secondes après le tunnel de la gare. Je me suis cette fois assis dos à la marche pour voir le pont Louis I.
La première heure de trajet est reposante et agréable mais n’offre pas de paysages notables: on traverse tranquillement, peut-être à 50-60 km/h, la campagne portugaise, entre villes et campagne. Au bout d’une grosse heure, on atteint les bords du Douro, mais ce ne sont pas les plus jolis.
Ce n’est qu’à partir de Peso de Regua, vers la deuxième heure, que les paysages réputés du Douro apparaissent. Il y a en réalité un moyen très simple de savoir si l’on est à Peso de Regua: le viaduc autoroutier ne peut pas ne pas être vu, il marque en quelque sorte la limite avec le Douro réputé. Je profite d’avoir les vieux wagons avec les fenêtres rabattables pour les ouvrir et mettre la tête dehors tout le reste du trajet. C’est une expérience unique que de pouvoir voyager en train la tête dehors, devant de pareils paysages.
Le train arrive à Pinhao au bout de 3 heures, tout le monde (ou presque) descend ici: les tours operators vendent des journées train-quinta-train sans grand intérêt sur lesquelles tout le monde se ruent; ce n’est pas ce que je cherche. Je descends quand même pour faire un tour de la ville; j’ai quatre heures avant que le dernier train de la journée passe pour m’emmener à Tua.
Justement, à 16 heures passe le dernier train de la journée. Les wagons sont un petit peu plus récents, mais toujours avec des banquettes de cuir. Ce quart d’heure de trajet est mémorable (je ne me doute pas encore que j’aurais 3 heures identiques le lendemain); la tête dehors, le ciel s’est dégagé, tout est bleu, les vignes et les montagnes sont désertes, les quintas (caves à Porto) s’enchaînent de chaque côté du train. Juste avant la gare, un pont passe le rio Tua qui sort à peine du barrage de Foz Tua, impressionnant par sa taille et sa proximité.
A l’arrivée à Tua, pas un chat dans les rues ou la gare; je suis le seul à descendre (nous étions 3 dans le train). Le village est comme mort. Ma chambre d’hôte est la seule ouverte; il n’y a qu’un restaurant pour manger le soir. Tua est vraiment isolée, oubliée des touristes; il y a ici une vraie authenticité, et les locaux me le prouveront le lendemain.
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